L’évaluation des élèves à l’épreuve du management
Sous l’ère Blanquer, en 2020-21, était lancée nationalement une procédure d’"auto-évaluation" devant permettre officiellement la réécriture des projets d’établissements. À la rentrée 2025, le rectorat de Lille demande à chaque collège de définir sa "stratégie de réussite" pour les élèves de 4e et 3e. Auto-évaluation, "plan de réussite"... Que ce soit au niveau national ou local, la logique est la même : installer une "culture de l’évaluation" qui exhorte les "managers" (personnels de direction) à piloter les établissements, voire les enseignements, à partir d’indicateurs chiffrés.
L’autonomie professionnelle dans le collimateur des réformes structurelles…
Ces dernières années, les attaques générales contre nos métiers et le caractère national du service public d’éducation se sont intensifiées : réformes du lycée et du bac, réformes du collège (« Choc des savoirs », réforme de la formation initiale). Il s’agit d’offensives nationales, identifiées et visibles, qui prennent appui sur des textes réglementaires et législatifs pour imposer des réorganisations/déstabilisations du travail en établissement. Le pilotage pédagogique en est confié aux cheffes d’établissement, désormais promues
managers.
… et des dispositifs locaux
Mais cette logique managériale, directement issue de l’entreprise privée, inspire aussi des dispositifs académiques qui contournent le cadre réglementaire et statutaire… toujours pour réduire la liberté pédagogique et reléguer les professeures au rang d’éxécutantes. de plans d’action imposés d’en haut.
Pour piloter heureux, manager caché ?
L’auto-évaluation des établissements se veut participative ? Le cadrage de l’évaluation des élèves en 3e doit être conduite, dixit le rectorat de Lille, via une « démarche collective » qui débouchera sur une « stratégie de réussite en 4e et 3e » : « état des lieux », « diagnostic partagé », « mobilisation des ressources », etc.
Pour résister : parler de la réalité de notre travail
Face à une institution qui veut imputer aux professeures la responsabilité des échecs du système, rappelons que l’évaluation est le résultat d’une ingénierie pédagogique complexe, flexible, mouvante, constamment guidée par le souci du progrès et de la réussite des élèves que nous avons face à nous. Prenons la parole collectivement pour rejeter toute standardisation de nos pratiques, pour lister les moyens dont on nous prive pour bien faire notre métier. Mettons le discours néomanagérial à l’épreuve du réel !
Jean-François Carémel
