21 juin 2020

Le Snes-FSU dans l’Académie

Interventions Snes et FSU lors du CT académique du 16 juin.

Madame le Recteur, Mesdames et Messieurs les membres du CTA,

La FSU souhaite bien sûr revenir sur les annonces présidentielles du 14 juin.

Le Président de la République a annoncé une accélération du déconfinement prévoyant dès le 22 juin « l’accueil de tous les élèves de manière obligatoire et selon les règles de présence normale » dans les crèches, écoles et collèges. Si l’on peut accueillir le retour de l’école obligatoire comme une bonne nouvelle pour l’école de la République, beaucoup d’interrogations restent sans réponse quant au protocole sanitaire. En effet, les personnels se questionnent et ont besoin de précisions sur l’organisation possible et les risques sanitaires liés au Covid-19. Quand bien même la distanciation serait « allégée » et le groupe classe au complet, comment effectuer un lavage des mains plusieurs fois par jour, éviter le brassage des classes, régler les problématiques de restauration, de transports,... tout ceci en étant assuré de ne prendre aucun risque pour sa santé et celles des élèves ?
La FSU vous demande, Madame le Recteur, de protéger et de garantir la santé des élèves, de leurs familles et des personnels.

Par ailleurs, les enseignant-es, victimes d’une campagne médiatique et politique de dénigrement et de calomnie, attendaient du chef de l’État une parole de reconnaissance du travail accompli qui n’est malheureusement pas venue.
Le service public d’éducation a pourtant tenu pendant cette période difficile grâce à l’investissement des personnels, en dépit des nombreuses difficultés auxquelles ils ont été confrontés. Les facteurs limitant la reprise sont avant tout d’ordre médical et matériel, liés à l’application des consignes et du protocole sanitaires. Nous savons toutes et tous qu’il était alors impossible dans le cadre de l’application du protocole, d’accueillir tous les élèves : si cela avait été clairement annoncé à la mi-mai par le ministre aux familles, de plus en plus pressées de reprendre le travail, cette campagne de dénigrement n’aurait certainement pas pu se développer. Comme vous l’avez rappelé à plusieurs reprises, nos collègues n’ont jamais cessé de travailler, y compris à distance quand ils.elles ne pouvait être présent.e.s sur site, y compris quand ils.elles ont pu retourner dans les établissements. Dans ces conditions pour les personnels du premier et du second degré, le 22 juin signifie non pas une reprise du travail mais le retour à un fonctionnement réglementaire des établissements scolaires.

ll ne suffira pas d’un claquement de doigt pour que tous les élèves soient dans les classes lundi prochain, quand bien même le protocole sanitaire le permettrait techniquement, ce dont nous ne pouvons que douter. À ce propos, il faut que nous vous fassions part de la colère de nos collègues qui se sont investi.e.s, y compris pour mettre en place le protocole sanitaire national et prendre toutes les précautions nécessaires et qui les voit s’écrouler en 20 secondes d’allocution télévisée. Ils savent très bien que les inégalités creusées dans la période, en particulier dans notre académie, ne pourront être résorbées en 15 jours : dire autre chose aux familles, c’est à nouveau les leurrer et créer de la frustration. De la même façon, les « vacances apprenantes » ne pourront solder le décrochage scolaire aggravé par l’usage de l’outil numérique dans les milieux populaires.

D’autre part, dans l’ombre, se poursuivent des dispositifs expérimentaux qui vont à contresens d’un service public d’éducation de qualité tel que le projet de « vacances apprenantes » que veut déployer l’association Agir pour l’école à destination notamment des élèves qui sortent de grande section de maternelle. Dans un communiqué daté du 15 juin, 13 organisations représentatives de la communauté éducative, dont la FSU, s’insurgent contre ce projet, et mettent en garde également les municipalités opératrices des « vacances apprenantes » contre le forcing de la rue de Grenelle pour leur vendre un dispositif considéré comme pauvre pédagogiquement et à l’efficacité douteuse.
Il ne s’agit pas de faire croire que de tels dispositifs permettront de gommer en quelques jours, la période que nous venons de vivre ou qu’ils pourront se substituer aux enseignements de professeurs qualifiés.
Pour la FSU il est urgent de mettre en place des concertations pour sécuriser les parcours scolaires et professionnels des jeunes. La FSU exige aussi des moyens pour cette rentrée afin de compenser les retards pris sur les apprentissages des élèves durant ce confinement.

La question qui se pose est donc bien celle des conditions de la rentrée de septembre 2020, pour laquelle aucun signe positif n’a été envoyé en direction de nos organisations. Quel que soit le niveau de circulation du virus en septembre, la FSU considère qu’il est capital d’annoncer dès maintenant un rééchelonnement des programmes d’enseignement à tous les niveaux, dans le cadre d’un plan d’investissement massif pour le système éducatif public. Nous aurons besoin de moyens en poste pour réduire la taille du groupe-classe ; l’admission de tous les admissibles au concours interne est un des moyens d’atteindre cet objectif. Nous aurons également besoin de moyens pour accueillir les élèves, les encadrer dans les espaces de "vie scolaire" et renforcer les équipes éducatives qui souffrent déjà cruellement de l’absence de création de postes supplémentaires depuis plusieurs années. La FSU réclame d’urgence des dotations supplémentaires d’assistants d’éducation, de CPE, d’AS, d’infirmières scolaires, etc.... pour répondre aux enjeux éducatifs qui vont se poser en cette rentrée.
Concernant les AED, la FSU demande la neutralisation des trois mois de confinement dans le décompte des 6 ans, limite réglementaire pour exercer le travail d’assistant d’éducation. En effet, le confinement n’a pas été sans conséquences pour les collègues arrivés en bout de course et pour lesquels il est difficile de se projeter dans l’"après AED", d’autant plus en cette période où le nombre de demandeurs d’emploi ne cesse d’augmenter. La neutralisation de la période de confinement, permettrait aux personnes concernées d’envisager la suite plus sereinement, avec plus de perspectives concrètes et permettrait aux établissements de préparer cette rentrée qui s’annonce compliquée avec des équipes stabilisées et formées. La FSU continue également à réclamer la mise en œuvre dès la rentrée de la formation statutaire prévue pour les assistants d’éducation.

La FSU rappelle son attachement profond à l’accès aux services publics de façon égalitaire pour toutes et tous sur l’ensemble du territoire.
Le Covid19 a mis en lumière la fracture sociale et le creusement des inégalités. Pourtant, le Président de la République n’a pas répondu non plus aux expressions demandant des changements profonds dans la société. L’accent mis sur la reprise de l’économie fait l’impasse totale sur le rôle des services publics et de leurs agent-es, le discours reprend celui du Medef sur l’effort, le « travailler plus ».
Le refus de toute contribution significative des plus aisés par la fiscalité va dans le même sens.
La FSU n’est donc pas dupe du sens de la "reconstruction" évoquée par le chef de l’État : il n’a pas annoncé d’investissement massif pour l’éducation. Il n’a laissé entendre à aucun moment qu’il reviendrait sur la déconstruction du dialogue social mis en place dans le cadre du paritarisme au moment de la reconstruction justement. D’ailleurs nous voyons bien en ce moment même, une grande continuité dans la mise en œuvre obstinée de la loi de transformation de la fonction publique, qui atomise le dialogue social et isole les agents face à l’administration dans les opérations de gestion liée à la mobilité.
Quant à l’évocation des corps intermédiaires dans le cadre de la reconstruction économique, elle relève donc d’un discours convenu contredit par le retour dans le paysage du projet de réforme des retraites.

Visiblement le Président de la République n’a pas tiré les enseignements de la séquence précédente et « maintient le cap », alors que de profonds changements sont nécessaires en particulier sur le plan économique, social et environnemental.

Pire, affirmant que « tout ne peut pas être décidé si souvent à Paris », la FSU comprend qu’une des priorités est la poursuite de la réforme de l’État et la résurrection des propositions Cap 2022, délétères pour les services publics, et qui prévoyait souvenons-nous notamment, une nouvelle carte des académies. La FSU sait bien ce que veut dire « bâtir de nouveaux équilibres dans les pouvoirs et les responsabilités » : affaiblir l’État central pour réduire les coûts et donc réduire sa capacité à assurer l’égalité républicaine, transférer des compétences aux acteurs locaux, fusionner, externaliser et privatiser des missions et des services au nom d’une proximité territoriale qui éloigne les usagers du service public. Dans notre secteur, cette territorialisation est à l’œuvre au travers des cités éducatives (à marche forcée comme le montre l’exemple du collège de Maubeuge), du dispositif 2S2C et du concept fourre-tout de vacances apprenantes. Elle est aussi encouragée par les rapports de la Cour des Comptes, comme celui qui préconise le regroupement et le transfert aux départements des médecins, des infirmier-es, des assistant-es de service social, et des PsyEN.
Demain comme hier, la FSU s’opposera contre les fossoyeurs du service public et de l’intérêt général, comme elle le fait en ce moment même en manifestant avec les personnels soignants.