19 juin 2017

Le Snes-FSU dans l’Académie

Textes adoptés lors de la CAA du 19 juin 2017

Au lendemain d’élections législatives désertées par les électeurs, la CAA fait un triple constat :
 sanction d’un gouvernement socialiste et associés sanctionné pour son action, et qui a multiplié les réformes contre les acteurs de terrain, notamment dans l’Education nationale ;
 montée d’une extrême-droite qui dissimule mal son alliance avec le patronat sous son maquillage étatique. En réalité son poids ne tient qu’aux politiques antisociales menées par les différentes majorités passées, jetant les populations dans la précarité et la misère, en particulier dans notre région où elle exploite de façon éhontée une misère sociale que nous retrouvons au quotidien dans nos classes et contre laquelle nous sommes démunis ;
 majorité accordée à un agrégat politique opportuniste, qui devrait très rapidement trouver une opposition dans les rues à défaut de la trouver dans un parlement à la légitimité remise en cause par un taux d’abstention inédit dans la Ve République. Les premières annonces concernant le monde du travail et celui de l’Education sont en effet soit très inquiétantes quand il s’agit d’amplifier la loi El Khomri, soit constituent de simples effets de manche à buts électoralistes quand il s’agit de rétablir les bilangues et l’enseignement du latin en omettant de rendre des moyens pour cela.

Quoi qu’il en soit, c’est la poursuite de la politique néo-libérale largement menée sous Hollande, après Sarkozy et Chirac, qui nous attend, en utilisant des ordonnances au besoin en lieu et place des recours précédents au 49-3 ! Pour les fonctionnaires cela se traduirait par le gel du point d’indice, des suppressions de postes, le rétablissement de la journées de carence et une réforme inquiétante et annoncée du système des retraites et des modalités de calcul des pensions (le montant de la pension devenant la variable d’ajustement annuelle du système).
Pour tous, sont prévues une hausse de la CSG et une remise en cause d’acquis sociaux et notamment la protection sociale.

Côté Education, le ministre Blanquer entend reproduire ce qu’il avait tenté de mettre en place en tant qu’ancien recteur de Créteil et ancien responsable de la DGESCO sous le ministère de L. Chatel qui nous mit tant à mal : expérimentations locales sans bilan contradictoire et renforcement de l’autonomie des établissements (voir le « rétablissement » des bilangues et du latin laissé au choix de chaque collège), casse des examens nationaux, relance de l’apprentissage et de formations privées, abandon des filières professionnelles aux régions, redoublement, etc...
Pour le SNES-FSU, il est nécessaire de remettre à plat la réforme des lycées de 2010, de s’opposer à tout projet de lycée modulaire sous-entendu par les annonces du ministre et d’engager une réflexion sur le baccalauréat et les épreuves qui le composent, ainsi que sur le fonctionnement opaque d’APB et les dérives qu’il génère.
Les annonces récentes du ministre Blanquer sur le bac sont inquiétantes : il est urgent que le SNES se mandate rapidement. La CAA propose de réunir un séminaire s3 / s4 à la rentrée pour élaborer revendications et stratégie sur cette question. Dans un contexte où tout est fait pour décrédibiliser l’examen, il faut réaffirmer de manière offensive :
notre attachement à un baccalauréat national et anonyme
notre attachement à un examen qui garde toute sa valeur et son rôle de premier grade universitaire, garantissant la poursuite d’études supérieures dans la filière choisie.

Le SNES doit diffuser un argumentaire solide contre le contrôle continu et la multiplication des CCF : ces modes d’évaluation mettent les établissements en concurrence, dotent l’examen d’une valeur purement locale, tout en faisant peser d’énormes pressions sur les équipes enseignantes et déstabilisent le fonctionnement des établissements. C’est toute une campagne d’information et de lutte que doit lancer le SNES sur le bac en lien avec le combat contre l’autonomie érigée en dogme par le nouveau ministre.

Le SNES-FSU refuse en effet à juste titre la logique d’autonomie revendiquée par le nouveau ministre, refus qu’il doit s’appliquer à lui-même : il n’est pas possible de lancer des campagnes nationales comme celle menée sur la rémunération des examens et renvoyer les collègues mobilisés aux sections académiques qui ne peuvent contrecarrer les interprétations de textes faites au niveau ministériel ! Il y va de la crédibilité de notre organisation et de ses militants, à un an des élections professionnelles, il y a va aussi de l’engagement des militants académiques et départementaux « envoyés au front » sans munitions et qui pourraient être tentés de jeter l’éponge.
Recrutement local des enseignants, généralisation du CCF, « assouplissement » de la réforme du collège décidé localement, sélection à l’entrée à l’Université… derrière l’autonomie mise en avant par le gouvernement, c’est une déréglementation et une offensive sans précédent qui se dessinent contre le service public d’Education.

Collège : « Assouplissement » contre abrogation

Au collège, cette autonomie entendue comme la déréglementation du système éducatif par l’autonomie des EPLE, a justifié un prétendu « assouplissement » de la réforme de 2015, finalement maintenue. En effet, l’arrêté du 16 juin 2017 s’inscrit globalement dans la continuité collège Vallaud-Belkacem : maintien des grilles horaires, de la dotation à disposition et donc concurrences entre les établissements comme entre les disciplines sous l’égide des conseils pédagogiques à la main des chefs d’établissement.
Mais l’arrêté va encore plus loin, en permettant à chaque établissement de mettre en place une offre d’enseignement très différenciée, sans la financer : la recréation des sections bilangues, des sections de type « euro » (rebaptisées Langues et Cultures Européennes), ainsi que l’augmentation du volume horaire dédié à l’enseignement des LCA/LCR doivent être financées sur la fameuse « marge d’autonomie » de 3h … en plus des groupes et autres cointerventions ! La flexibilité des horaires d’enseignement, introduite en 2015 (globalisation des sciences expérimentales et de la technologie en 6e en même temps que disparaissait pour elles le ratio : 2h prof / 1,5h élève), est potentiellement aggravée : la modulation des enseignements obligatoires sur le cycle 4 n’a plus de limite, et l’horaire hebdomadaire des enseignements facultatifs (bilangues, LCE, et LCA/LCR) peut désormais fluctuer d’un collège à l’autre.
Les professeur-e-s de lettres classiques et ceux d’allemand, notamment, ne sont pas dupes : outre la difficulté majeure de modifier en juin le TRMD voté en janvier, sans aucun moyen supplémentaire, s’est ajoutée la quasi impossibilité de retrouver les effectifs perdus depuis la rentrée 2016. On ne reconstitue pas des disciplines ou des dispositifs qui ont été décapités à coups de textes réglementaires sans moyens fléchés.
La seule évolution intéressante concerne les enseignements complémentaires (AP et EPI). Si les EPI existent toujours dans les textes, ils sont considérablement affaiblis par la suppression pure et simple des thématiques, et relégués au niveau des nébuleux parcours. Le programme redevient la seule référence en termes de contenus enseignés. Bien sûr, les élèves doivent en théorie « bénéficier » des 2 types d’enseignements complémentaires (AP et EPI) à l’issue du cycle 4 (ce peut être un EPI en tout et pour tout sur les 3) … mais dans le même temps, le projet d’arrêté a rayé la disposition imposant la participation de chaque discipline aux EPI : les chefs d’établissement ne peuvent plus dorénavant l’imposer à aucune équipe disciplinaire. Dans le même ordre d’idées, le texte supprime toute nécessité d’un EPI pour mettre en place l’enseignement de LCA/LCR, ce qui n’est pas rien. Enfin, le retour des enseignements facultatifs démontrent que les 26H hebdomadaires ne sont pas un plafond indépassable. Ce que nous répétons depuis 2015 !

DNB 2017 :

Cette évolution implique la révision réglementaire des modalités du DNB. Pour la CA, ces modalités doivent être revues de fond en comble, sous peine de voir la profession rejeter la pertinence de l’examen lui-même, dont la session 2017 est vécue sur le terrain comme un véritable naufrage professionnel et pédagogique. A quelques jours des épreuves écrites, il est judicieux de permettre aux collègues d’exprimer leur rejet des pressions hiérarchiques sur leur mission d’évaluateurs (pour imposer des évaluations par compétences transversales), et leur attachement au lien étroit entre le travail disciplinaire effectué au quotidien avec les élèves, et sa prise en compte en vue de l’examen.
A cette fin, la CA mandate le SNES afin qu’il revendique notamment :
la révision des décret et arrêté du 31/12/2015 relatif au livret scolaire unique, de façon à obtenir la suppression du bilan de cycle 4.
la révision, le cas échéant, de l’arrêté DNB du 31/12/2015 pour obtenir la fin de sa prise en compte dans le cadre du DNB en guise de contrôle continu.
La contribution transparente de toutes les discipline, d’égale dignité, au contrôle continu.
La réduction du poids du contrôle continu, et de l’épreuve orale, au profit des épreuves terminales écrites et anonymes.
Un cadrage strict de l’épreuve orale imposant la prise en compte des contenus disciplinaires travaillés dans le cadre des programmes.
Une pétition nationale permettra cette expression et appuiera notre action pour obtenir un nouveau DNB.

« DEVOIRS FAITS »  :
Le ministre tente, dans la précipitation la plus totale, d’afficher la mise en place d’un dispositif nommé « devoirs faits ». Il s’agit en fait de plaire à l’opinion en renommant l’accompagnement éducatif créé sous Sarkoky et maintenu dans l’éducation prioritaire, et de recourir dans les collèges ordinaires à des intervenants extérieurs bénévoles, puisque peu de moyens seront débloqués. Le SNES-FSU dénonce un effet d’annonce,
Dans le contexte de campagne électoral pour les législatives, JM Blanquer a tenté de ne fâcher personne, ni les organisations minoritaires qui ont collaboré à la réforme Vallaud-Belkacem (maintien théorique des EPI et des grilles horaires), ni le SNES-FSU qui continue de revendiquer son abrogation : à nous, sur le terrain, de pointer dès la rentrée les effets d’annonces et de mettre en échec la mise en concurrence des personnels au nom de « l’autonomie ».
Partie lycée : le lycée n’est pas épargné par les difficultés liées à la réforme du lycée de 2010 et à la hausse démographique sans créations de postes à la hauteur :
des classe surchargées s’annoncent encore pour la rentrée prochaine alors que la quasi suppression du doublement nécessite un suivi plus soutenu d’élèves qui arrivent dans la classe supérieure sans les acquis suffisants. Mais non, cyniquement le rectorat et le ministère font le pari que si l’élève n’a pas réussi dans une classe de 35 en seconde, il réussira dans une classe de 35 en première. Les motivations ne sont pas pédagogiques, mais comptables : il faut gérer des flux d’élèves face au manque de professeurs … jusqu’à interdire le doublement des élèves de première qui l’auraient pourtant accepté voire demandé … et ce, au mépris de l’expertise des professionnels que nous sommes, et aussi des élèves et de leur famille.
La sérénité des examens et des personnels est également soumise à rude épreuve. Nous demandons que les collègues de toute disciplines soient déchargés de surveillance dès qu’il commence ler travail de correction des copies et/ou de préparation des oraux (prise en charge des descriptifs pour l’EAF) ; par exemple, les professeurs de Français doivent en effet absorber 2600 candidats en plus, sans moyens supplémentaires et l’organisation des oraux ne tient pas compte des préconisations du CHSCTM. En outre le refus de les décharger des surveillances par le Recteur montre à quel point celui-ci ignore la réalité du travail de préparation des oraux. Le Snes doit intervenir en ce sens et engager une mobilisation nationale dans la poursuite des actions académiques et au CHSCTM : réunions des collègues de lettres en lycée avant les vacances de Toussaint et dépôt d’un préavis de grève dès mars afin de forcer les rectorats et le ministère à négocier de manière à faire évoluer les textes comme les épreuves ont évolué. En BTS, la dématérialisation des copies a conduit à des dérives inacceptables : pression sur les correcteurs « espionnés » en permanence par des IPR, menaces sur la notation.
L’expérimentation des quotas de bac pro en BTS remet en cause les possibilités d’accès des élèves des voies technologiques à cette formation. Sans places suffisantes en BTS sous statut scolaire, la réussite des élèves est mise en danger, que les élèves aillent en BTS en apprentissage ou en DUT.

Communication :

Le SNES-FSU est un interlocuteur incontournable pour l’Education. Mais les élections professionnelles qui se dérouleront en décembre 2018 pourraient amener de mauvaises surprises : risque déjà dénoncé d’une faible participation à cause du vote électronique et d’une campagne électorale numérique, collègues « volatiles » (ne connaissant pas les orientations syndicales des organisations qui se présentent et/ou pouvant être sensibles à un « coup de comm ’ » de dernière minute, et/ou mesurant mal l’enjeu des CT par rapport aux C.A.P.), absence de visibilité du travail militant fourni pendant que certains syndicats se contentent de communiquer plus vite et plus efficacement, se donnant ainsi le beau rôle et ce jusque dans l’instrumentalisation pure et simple des instances ! Il nous faut donc repenser notre manière de communiquer : nous écrivons beaucoup, trop, en utilisant parfois un langage « codé ». C’est un travers contre lequel il est illusoire de lutter comme le montre l’expérience des textes de congrès que nous souhaitons à chaque fois alléger, sans succès. Il nous faut donc développer - à côté de notre communication habituelle - une autre forme de communication, utilisant les réseaux sociaux, mais aussi et surtout les salles des profs dont l’audience reste quand même bien plus forte et efficace que facebook ou twitter : il est aisé de s’en rendre compte lorsque l’on anime des heures d’infos syndicales.

Le SNES-FSU de Lille propose donc de :
relancer les stages de proximité dans les bassins, sur des thématiques précises (PPCR, bac, …)
développer une politique volontariste et ambitieuse de stages lui permettant de présenter, rediscuter et d’enrichir ses revendications, mais aussi de recruter de nouveaux relais et militants
réfléchir à des publications « papier » et par mail plus efficaces et accrocheuses
développer des campagnes d’affichage régulières pour les salles des profs.

Enseignement privé dans l’académie de Lille

L’enseignement privé est le laboratoire de l’autonomie et de la déréglementation : rythmes scolaires, réforme du collège (même assouplie) qui ne s’appliquent pas, vacances différentes (plusieurs établissements privés ont déjà annoncé que les vacances de printemps commenceraient le 25 avril pour se terminer le 13 mai. Les élèves et enseignants du privé auraient donc 2 semaines et demie de vacances (une aubaine pour la deuxième semaine de vacances puisqu’elle est hors du calendrier scolaire) contre deux semaines seulement pour l’enseignement public. Sous le déguisement de cette autonomie que les collègues du public pourraient envier puisque les réformes néfastes ne s’appliquent pas au privé, c’est la déréglementation qui se prépare pour tous.
Texte adopté à l’unanimité des 32 présents